Un malentendu navrant

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Trois semaines tout juste, avant de s’installer dans leur nouveau pavillon de Nottingham, un jeune couple remarqua quelques déplacements d’objets dans leur future maison. Quatre cambriolages avec, en forme d’otages, des messages traînant ici ou là dans le salon : lors du premier cambriolage, le couple lut le message suivant : « Pourquoi sommes-nous là? », lors du deuxième passage, le message, en équilibre sur une plante attira leurs yeux ; « Et oui, pour vos herbes » et puis, au troisième passage le message traînait sur le sofa « Nous avons assurément les mêmes goûts pour les plantes ! »

Elle et lui en avaient assez de ces intrusions répétitives, de subir ces farces provocatrices qu’ils ne comprenaient pas, ces p’tits mots parachutés ? Il jura à sa femme que, cette fois-ci, ils les coinceraient. Il leur rédigea un message très clair : « On ne veut plus vous voir ici. Nous aménagerons la semaine prochaine ». Il voulut toutefois en avoir le cœur net en espionnant les voyous : les défier, les narguer, capter le moment où quelque chose serait immortalisé.

Il emprunta un système de surveillance dans la société de sécurité où il travaillait. Ils l’installèrent ensemble : lui grimpa sur des escabeaux pour dissimuler les caméras en hauteur tandis qu’elle rampa pour les placer dans les recoins du salon.

Comme prévu, le lendemain matin, ils découvrirent les images très nettes du larcin : deux énergumènes avaient littéralement investi leur salon, l’un installé confortablement sur un sofa, l’autre jouant de la guitare, se sentant en pays conquis. Une ambiance somme toute sympathique avec une musique planante des Pink Floyd. Le jeune du sofa sortit un papier, et griffonna :

« Merci pour votre hospitalité. On se si sent bien chez vous.

On aimerait faire votre connaissance car on a un marché à vous proposer ».

Au dos, le titre de la chanson des Pink Floyd « Pigs on the Wings » de l’album Animals [1].

Mais pourquoi ces papiers, pourquoi cette farce, à quoi tout cela rimait-il ? Elle mit les papiers bout à bout :

« Pourquoi sommes-nous là? », « Et oui, pour vos herbes », « Nous avons assurément les mêmes goûts pour les plantes ! », « Merci pour votre hospitalité. On se si sent bien chez vous. On aimerait faire votre connaissance car on a un marché à vous proposer ».

– Ils cherchent à nous rencontrer, lui dit-elle, mais restons-en là.

Lui se prélassait, détendu, sur le sofa, fumant une longue cigarette et rêvassait à haute voix. Il était si fier de tenir bientôt ces deux jeunes délurés qu’il remit la bande vidéo à leur commissariat local : ils seraient enfin pincés !

Au petit jour, quelle bonne surprise de voir débarquer chez eux la police. Ils en étaient tout ébaudis, joyeux, ravis, enchantés et même excités. C’est alors que les policiers leur passèrent les menottes aux poignets, au motif des plants de marijuana cultivés dans leur maison.

[1] https://www.youtube.com/watch?v=hQbNwvBkfag

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Brigitte DANIEL ALLEGRO – Castelnau d’Estrétefonds, le 27 septembre 2021

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